un Passage au Maroc

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Approches & rencontres, notes et réflexions, images… témoignant d’un contact intime avec le Maroc, où l’auteur a longtemps séjourné. Il évoque ici, sous forme de fragments, quelques-unes des mille facettes de ce pays, de ce peuple fier et généreux. Photographies de Abderrazak Benchaâbane.

Description

 

Un livre de dialogue entre un auteur ayant longtemps vécu au Maroc, et un photographe marocain de grand talent.

 

5.

A l’automne tu ne reconnaissais plus ton monde : le soleil avait tanné les peaux, le sel creusé les rides. L’Afrique avait accru sa présence ; les yeux des Berbères et ceux des Arabes trouaient d’un même feu les visages cramés ; tout un peuple avait revêtu la même beauté brune et mate. Prunelles de jais en éclats fichés dans l’iris lactescent ; œillades assassines… Les ruelles des médinas assommées de soleil tressaillaient à la nuit, tombée d’un coup. La ville tout entière s’offrait à la brise exhalée par la mer, montait jusqu’à toi. Et tu la caressais des yeux comme on étrille la croupe d’une jument.

 

16.

Notre insouciance côtoya longtemps la misère et l’ignorance dans lesquelles étaient maintenues les foules. L’époque était aveugle ; et les prisons, pleines. Certains ne voyaient rien, ou si peu ; d’autres ne voulaient pas voir, ni entendre les hurlements montant du fond des geôles. Tazmamart, dit un jour le Souverain à son peuple, qu’est-ce d’autre que la Vallée des roses ? Roses de sang, foulées aux pieds deux décennies durant.

 

 

Hassan Wahbi, écrivain, poète, universitaire, à propos de ce livre :

 

« Bonjour Alain,

J’ai reçu et lu ton livre de passager. Cela m’a  fait plaisir de prendre connaissance de tes impressions et des photographies de Benchaaban. Je suis touché par tes sentiments face à une société contradictoire que  » tu aimes d’un amour exigeant « ou » critique, » comme dirait l’autre. Je suis dans la même situation au point d’être dans une sorte d’exil intime, mais sans mélodrame.
J’apprécie ton éloge de Kacimi et du flamboyant Aboulouakar ; le premier est d’une grande et douce humilité, le second est dans la merveilleuse folie du « baroque »et des transfigurations oniriques des corps.
Par rapport à la société marocaine même, tu es dans le ressenti réel d’où les pointes politiques assassines et la résistance à la comédie culturelle. (…)
Hassan Wahbi

 

Alain GORIUS et Abderrazzak BENCHAÂBANE, un Passage au Maroc, Al Manar, 2019, 48p. 16 euros. Textes et photographies.

 

Ces « notes » d’un ami fervent du Maroc et de ses gens ont pour but de garder des traces d’un « passage », dans ce pays aimé, celui de l’Extrême-Couchant comme Gorius le nomme.

Pour dire ces « moments de vie » passés au contact chaleureux des Marocains, humbles ou plus connus, gens de la rue ou artistes, peintres, écrivains, poètes, l’auteur a fait appel, au-delà de ses textes,  aux belles photographies de Benchaâbane, en noir et blanc, portraits, scènes de rues ou paysages, femmes au bord de l’océan, visages burinés, regards vifs et intenses.

Les voyages ne laissent pas indemnes et c’est leur grandeur que de grappiller la beauté pour qu’elle ne s’étiole pas.

En vingt-quatre courts fragments, d’une prose très poétique, Alain Gorius énonce ses préférences, ses choix, ses pérégrinations. Ses blasons nous valent des textes tendus et tendres, jamais complaisants, avec la distance de l’écriture et du coeur. Et ses textes vibrent, comme le rappel des choses à conserver coûte que coûte.

C’est le portrait de femmes, leur beauté insolente ou cachée ; c’est celui d’artistes comme Kacimi, peintre et poète, comme Mohamed Abouelouakar, ou encore à l’image du poète longtemps enfermé à Kenitra, Abdellatif Laâbi.

Honorer les artistes et leur force de résistance face à un régime qui fut, comme sous Hassan II, tortionnaire, c’est prendre le parti de la beauté, des gens, de l’innocence et de l’art. Gorius écrit là de belles pages sur la liberté à sauvegarder.

 

De temps à autre des corps presque nus croisaient ta route, portés sur l’eau par le vent ; tu sentais monter en toi le désir immense de les emporter tous… (11.)

 

Tazmamart… une sorte de caserne bâtie dans le désert ; dans l’absence de tout. Une prison-mouroir, secrète, poussée comme une verrue au creux d’une vallée du Haut-Atlas. (17.)

 

La mention de Tazmamart montre à quel point l’auteur de ce petit livre fervent, est aussi un photographe aiguisé d’une réalité qui ne fut pas toujours connue, ici, en France, en Belgique. L’étouffoir des régimes parfois réussit à cacher ses horreurs.

 

De ce livre, récit, notes, témoignages, pensées ferventes, constats amers, le lecteur prélèvera surtout la belle écriture resserrée et attentive au plus menu, au plus concret. Le voyage au Maroc lui aura appris à mieux se connaître, à mieux appréhender toute réalité.

Les quatorze belles photos qui accompagnent le livre reflètent aussi une connaissance intime du pays et de ses gens.

Un beau livre d’artiste.

Philippe Leuckx, La Cause littéraire

 

Alain GORIUS est écrivain et éditeur. Il dirige les belles éditions AL MANAR.

Abderrazzak BENCHAÂBANE est un photographe marocain.

 

Philippe Leuckx est un écrivain belge.

 

Caractéristiques

exemplaire

L'un des 500 ex sur Bouffant de l'édition originale

format / papier

13 x 19, Bouffant édition

isbn

978-2-36426-240-9

nombre de pages

48

parution

,

Auteur

GORIUS Alain

Artiste

BENCHAÂBANE Abderrazzak

Collection

Approches & Rencontres