Description
« Quel pouvait bien être le nom de l’adolescente restée allongée, à minuit passé, sur le rebord de pierre de l’autre côté du mur du jardin ? Sa peau était grise de poussière. A deux pas de la grille restée entr’ouverte elle était là, bien éveillée, pieds nus dans sa djellaba en haillons ; sa tignasse ébouriffée reposait sur le béton peint en ocre-rouge, couleur de remparts. Elle lui sourit, le suivit dans le débarras du local dont il avait laissé la porte ouverte sur la touffeur de la nuit, sans une lumière : d’un seul discret mouvement de la tête il l’avait invitée à le rejoindre ; elle était, naturellement, venue. Il l’appellerait Leïla, puisque ce prénom est lié à la nuit et à la folie : elle était bien incapable d’écrire son nom et même, il s’en aperçut à l’instant, de le lui dire… »
Les photographies de Joël Leick (nus et paysages) accompagnent le texte en l’illuminant de leur lumière noire. Textes et images paraissent indissociables – comme il convient dans les livres de dialogue.
Brèves – Actualités de la nouvelle. N° 113, décembre 2018
Editeur, Alain Gorius est forcément séducteur, cela va de pair. Il manie aussi l’écriture de main de maître. On le sait ici depuis longtemps. Il donne dans ce recueil des textes précieux qui parlent d’amour et de l’amour. « Conçoit-on passe-temps plus spirituel ? » Echanges passionnés résistant à l’épreuve du temps, ou conquête guerrière menée tambour battant autour d’une table de lecture en bibliothèque, affaire d’une heure ou d’une vie, toujours on retrouve le charme secret de jeunes héroïnes. Elles sont magnifiées par les photos de Joël Leick qui leur donne chair et lumière.
Dominique Brua
Décharge, n° 180 Alain Gorius / Joël Leick : PORTRAITS SECRETS (La Lucarne des écrivains)
On connaît davantage l’éditeur d’Al Manar que l’auteur Alain Gorius. (Rappelons en ce qui nous concerne ses deux Polders au tout début de la collection, n° 7 et 59). Il donne ici sept nouvelles qu’on pourrait qualifier d’érotiques si l’on veut, en tout cas, dans lesquelles la sensualité est reine. Chacune est titrée par le prénom d’une jeune fille, héroïne fugace, à la fois évanescente et bien concrète, d’une courte histoire. On est toujours à la limite du rêve où l’imagination enflammée galope et de la fiction, certes, mais implantée dans l’Orient merveilleux ou la nostalgie au retour d’Algérie. Ce peut être aussi l’observation à la bibliothèque ou les souvenirs de lycée. On n’est pas loin du Baudelaire de la passante ou des contes de Bresson. Les photos de Joël Leick, avec la même tonalité que les textes d’Alain Gorius, complètent ce traité du corps et des sens.
Jacques Morin
19,90 €. 115 rue de l’Ourcq – 75019 Paris.