Description
Dans l’obscurité éblouissante
nous sommes les fantômes de ceux qui étaient là-bas
une cascade de lumière qui conduit vers le soleil
et qui nous a ouvert toutes grandes les portes
de votre enfer
et du nôtre
La critique
Fadwa Suleimane « Deviens qui tu es tu le seras » Toi qui t’enfuis du temple d’Apollon in Dans l’obscurité éblouissante, traduit de l’arabe par Sali El Jam, éditions Al Manar 2017, p.33 Ce bref poème, dit en français par Fadwa Suleimane, restera gravé dans le cœur de tous ceux venus l’écouter, au détour d’une rue de la ville haute, le 25 juillet 2015, lors du Festival de poésie de Sète. L’auteur, alaouite, née à Alep en Syrie en 1970, actrice connue en son pays, s’est élevée contre le gouvernement d’Assad en 2011. Recherchée par les forces de sécurité, elle a dû fuir son pays pour se réfugier en France, en 2O12. Ce 25 juillet 2017, souriante et résolue, la tête coiffée d’un petit foulard bleu, elle mit toute son ardeur à transmettre ce qui l’animait, avec la ténacité de ceux et celles qui n’ont plus rien à perdre, après avoir tout perdu. « Les Arabes sont ancrés dans la poésie, tout est poésie ». Notre langue est à l’intérieur de nous et pas dans les décombres ». Elle devait s’éteindre, 24 jours plus tard, emportée par un cancer. Dans l’obscurité éblouissante ibid p.31 Dans l’obscurité éblouissante ibid p.13 Dans l’obscurité éblouissante ma main droite est un pont formé des têtes de mes amis ibid p.45 Dans l’obscurité éblouissante ibid p.47 Dans un précédent recueil intitulé À la pleine lune, traduit également en français et paru aux éditions Le soupirail, en 2014, elle écrivait : « Devant le trou noir, j’attendrai l’espoir » . Dans l’obscurité éblouissante in Dans l’obscurité éblouissante, Al Manar 2017, p.69 Fadwa Suleimane a tenu également à lire à Sète, tel un testament, la fière harangue qui figure dans ce recueil, à la page 71 : Nous jurons au nom du dieu qui est beau : que nous voulons une Syrie libre et unie et que nous sommes un peuple authentique et fier ibid, Dans l’obscurité éblouissante, éditions Al Manar 2017, p.71 Interrogée par Gérard Meudal sur la place incongrue de ce pamphlet politique au milieu de ses poèmes, elle s’expliqua ainsi : « Ce texte devait être où il est. En Syrie, j’avais proposé de planter des oliviers dans les jardins en mémoire des gens assassinés. Les gens sont venus pour creuser la terre, ils ont planté quatre arbres avec notre accord. J’ai proposé alors aux présents de faire un serment avec leurs mains pleines de terre : « nous jurons au nom de Dieu qui est unique, nous jurons que nous sommes des manifestants pacifiques, nous jurons que nous sommes un peuple civilisé, fier et libre ». Son courage et sa détermination à témoigner en faveur de la paix demeurent, tels un lumignon d’espoir pour tous les peuples du monde déchirés par la guerre. Le propre de la poésie est d’être universelle et de faire vibrer les cœurs bien au-delà des frontières de la langue et du temps. Bibliographie : sur internet: Roselyne Fritel, Le temps bleu, 2017
Sélection poésie, (I.L.), La Nouvelle Quinzaine Littéraire: Fadwa Suleimane De Damas à Dax, la poésie brûlante de la Syrienne Fadwa Suleimane, poète, actrice et militante en exil disparue le 17 août dernier à l’âge de 47 ans. Une langue paradoxale qui calque le processus de lutte comme celui de la survie. I. Lévesque, La Nouvelle Quinzaine Littéraire, n° 1184, 1er décembre 2017. |
Mort de Fadwa Suleiman, icône de la révolution syrienne20:50 17 août, Le Monde Debout dans la foule manifestant à Homs contre Bachar al Assad, bravant les armes et les hommes de main du tyran de Damas, c’est l’image que le monde gardera de la comédienne syrienne Fadwa Suleiman, dont on a appris jeudi la mort à Paris des suites d’un cancer. Elle avait 45 ans. Devenue très vite une icône de la révolution syrienne, dans laquelle elle s’était engagée corps et âme dès les premiers jours, elle avait dû fuir la Syrie un an après le début du soulèvement pour des raisons de sécurité et s’était réfugiée en France où elle continuait, comme elle le pouvait, à combattre le régime syrien. «Le monde entier a laissé les mains libres à Bachar al-Assad, pas seulement la Russie et la Chine, il a poussé le peuple syrien à prendre les armes, exactement ce que voulait Assad, et voilà où nous en sommes… », nous avait-elle confié en juillet 2012, peu de temps après son arrivée en France. A la tribune d’une conférence organisée à l’université d’Avignon, dont elle était l’invitée, elle avait harangué ce jour-là les chefs d’Etat d’une voix vibrante : «Messieurs les leaders du monde, bougez-vous un peu pour que le fou qui nous tient dans sa toile s’arrête ! Après seulement, vous aurez la solution !». Cette supplique apparaît poignante aujourd’hui quand on sait tous les renoncements qui ont suivi, notamment celui de Barack Obama en 2013, après que Bachar al-Assad a utilisé l’arme chimique contre sa propre population. |