Toutes les nuits sont pleines de lunes

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13 mars 2024 : vient de paraître ! Second recueil de Brigitte Giraud chez Al Manar. Photographies de Véronique Lanycia.

Description

On ne rêve pas.

La nuit s’écrit presque sans nous,

une phrase en boule qui comble les cavités des incertitudes,.

On jurerait que les mots ont des yeux, des mains et un corps,

puisqu’on pourrait trembler.

 

CHRONIQUE

Je viens de lire un bon, non un très bon livre « Toutes les nuits sont pleines de lunes »  de  Brigitte Giraud grande écrivaine et poétesse.  Et j’ai envie de vous en parler :

Journée pluvieuse de bruits métalliques. Une petite lampe éclaire des mots. Mon vieux chien dort. Des barreaux noirs, mastocs grillagent l’astre.

Je lis silencieusement.  Soudain de cette cage, les mots tambourinent si fort qu’ils m’obligent à les libérer. Alors, je les chuchote.  « C’est elle qui nous conduit quand on a guéri du jour et de ses bruits ».

« Elle », ce pourrait être Œdipe « La nuit nous égare sur un chemin imprévu, le silence est un simulacre. Ou une absence » ; « Elle » serait une amazone fantasmagorique « On se dit que la nuit ressemble…aux nuages qui font de grandes batailles là-haut, à la chair des rêves devenus fous, à des mots étouffés…, à des couleurs violentes… ».

La voix exorcise la chimère, elle s’accorde à la poésie. Je lis presqu’à voix haute.  « On s’installe dans un présent qui suffit à la nuit. On s’assoit sur la pierre en plume d’oie de l’éternel retour. Et les regrets sont morts. »

La poétesse m’invite, de valses en errances, à travers cette multitude de lumières « Tu laisses alors planer tes yeux dans l’air et tu attrapes des petites poussières qui volent dans un rayon de lumière. Tu penses sans raison à une expo de peinture… ». Lueurs tamisées, éclairs aveuglants ; tantôt flambeau, tantôt chandelier.

« Elle », métamorphose du phœnix. « Elle » quête perpétuelle ou oracle lunaire, peut-être une sorte de mise en ordre. « On fait le tour à l’intérieur de soi », « Tout un charivari perdu en soi ».

Puis, il est « quatre heures passées ».  Sous mes doigts, le livre se partage et je murmure « Toutes les nuits sont pleines de lunes ».

« Un grain de soleil tombe dans la mer »
Brigitte Giraud m’entraîne dans cette phase entre la nuit et l’aube ; elle décrit avec finesse et grande poésie cet état physique ou mental qui oscille entre les deux mondes Un déchirement s’insinue avec le « on », le « tu » mettant fin aux têtes à tête avec soi-même.  Puis Le mouvement s’accorde au son du piano. Serait-ce un corps qui, longuement, s’étire ? Avec lui, tous les sens œuvrent, comme dans une volonté de s’extraire de la torpeur nocturne. « Tu sors dans le jardin goûter l’air mouillé… ».

Et puis le jour est là. « La nuit s’écorche dans le bruissement des arbres…les ombres s’effondrent sur le lit, et creusent des abîmes où coucher encore des rêves flous » L’auteur de ce texte beau, profond parvient à une symbiose des éléments, des êtres, des choses. Il n’y a pas d’échelle, de hiérarchie, de chronologie, en revanche une synchronicité certaine s’inscrit.

Le lecteur écoute le tap tap tap de la pluie, le bruissement du vent ; essuie d’un revers main les gouttelettes qui jaillissent, caressent les plumes du rapace des images monochromes.

Chaque mot, chaque poème, chaque page incarne le repli ou l’éclosion de l’être seul ou avec l’environnement.

« Toutes les nuits sont pleines de lunes » est un hymne au temps.

« Un éclat d’aube nous traverse comme le temps sur nos vies. »

Marie-Noëlle Fargier


Toutes les nuits sont pleines de lunes (Al Manar, 2024)

« Quand la nuit s’est lentement déposée sur la ville », Brigitte Giraud fait l’inventaire de tout ce qui tient en éveil « jusqu’à ne pas pouvoir fermer les yeux » : un bruit sec dans la rue, l’ombre d’un rideau, un battement de porte, la pluie sur le toit, une voiture qui passe, l’aboiement d’un chien, le grincement d’un volet.

De ses mots sobres et précis, elle décrit sans la nommer l’insomnie qui hante ses nuits. Au fil des heures et des pages, elle passe en revue les stratagèmes qui seront vains : « On ferme les yeux une nouvelle fois », « on met de la musique », « on s’entoure encore d’une laine ». Avec l’espoir, en pure perte, de « surprendre le moment du passage ultime, le basculement au noir », elle tente de saisir la substance de la nuit « qui s’écrit presque sans nous ». En connivence avec l’auteur, « on a peur, tellement peur / qu’elle ne soit rien / juste un temps mort. »

Captive des sortilèges de la nuit, « quand l’écriture devient voix », elle retient notre attention avec douceur et tendresse dans un temps de lenteur où « nos pensées se perdent ». Les photographies de Véronique Lanycia donnent à voir l’immensité du ciel obscur qui dérive sous les paupières.

Marie-Josée Christien, chronique « Nuits d’encre », n°30 de la revue annuelle « Spered Gouez / l’esprit sauvage » à paraître fin octobre 2024

Caractéristiques

exemplaire

L'un des 500 ex sur Bouffant de l'édition originale

format / papier

15 x 21 sur Bouffant édition

isbn

978-2-36426-390-1

nombre de pages

86

parution

,

Auteur

GIRAUD Brigitte

Collection

Poésie