Description
2021. Un poème pour la Palestine, en sept langues — pour une plus grande résonance.
(…)
Je m’assois sur cette pierre
Où les doigts du souvenir réinventent pour moi une maison
chaque soir
Je me souviens
D’une porte qui claque
D’un pas léger dans mon coeur
D’un rayon de lune dans les branches d’un arbre
Nous sommes partis
Pour rejoindre les errants
Sur une longue route
Sous un ciel sombre
J’ignorais que tout oeuvrait dans l’âme obstinée d’un enfant
Pour que cet instant perdure et ne meure pas
(…)
« Le vieil homme » de Kebir M. Ammi, Al Manar, 2021.
Philippe Leuckx, septembre 2021
« Le vieil homme » vu par Khalid Lyamlahy (En attendant Nadeau)
Kebir M. Ammi n’est pas étranger aux incursions poétiques. Entre deux romans voyageurs, il lui arrive d’écouter le monde depuis l’horizon du poème. Ici, il donne voix à un vieil homme palestinien qui sonde le sillon de ses blessures et le cynisme de ses agresseurs. Mémoire d’une errance au crépuscule de la vie ou élégie pour une terre piégée dans le silence du monde ? Contre la destruction et la défaite, le vieillard qui parle s’acharne à conjuguer le dire et le faire : « J’ai fait le serment / De bâtir / Sur le visage des absents ». Contre la brutalité et l’expropriation, il reconstruit, avec « les doigts du souvenir », des maisons de substitution. Dans ce poème des ruines et de la résilience, le déséquilibre des forces importe peu car le vieil homme a « l’âme obstinée d’un enfant » et « un ciel paisible et fraternel sur ses épaules ». Offert en sept langues (on pense à la symbolique du chiffre sept dans les trois religions du Livre), Le vieil homme est rehaussé de dessins calligraphiques de Rachid Koraïchi où le chiffre, la lettre et la géométrie prolongent le souffle du poème.
Khalid Lyamlahy, En attendant Nadeau, mars 2022