Éperdument

22


Quatrième de couverture

« Éperdument : un enfant d’Alep au bord de la Seine » : le récit d’une vie portée par la musique et l’amour de la poésie, par le chanteur, compositeur, homme de lettres Abed Azrié. Un voyage passionnant depuis Alep jusqu’à Paris, en passant par Sumer et Gilgamesh, dont Azrié a recomposé l’épopée dans un livre qui a fait date.

Description

Abed Azrié veut mettre les joyaux de la culture arabe entre toutes les mains

Libération

Abed Azrié règne depuis une vingtaine d’années sur un territoire imaginaire qui embrasse tout le Moyen-Orient, ses cultures, ses musiques, ses histoires.

La Croix

Ne lui demandez pas sa nationalité ! Abed Azrié a passé toute sa vie à se débarrasser d’être d’ici ou d’ailleurs.

L’Express


Écoutez l’entretien d’abed Azrié sur RFI, avec Laurence Alois :


Au fil des pages d’Éperdument, Abed Azrié raconte un parcours passionnant depuis sa Syrie natale. Élevé par une mère qui « voyait la couleur et le printemps en tout, elle a planté en nous le verbe « aimer » », Abed est très tôt fasciné par les instruments de musique. À huit ans, enfant de chœur, il voulait jouer de l’orgue à l’église, et chaque dimanche, courait les messes des différents rites, byzantine catholique, orthodoxe, chaldéenne, syriaque, arménienne, latine et protestante.

Son arrivée à Paris, en 1965 à l’âge de dix-neuf ans, marque le début de sa formation musicale. Il intègre l’école Martenot puis l’école normale de musique, apprend la langue en traduisant de la poésie française vers l’arabe, et devient un chanteur et compositeur incontournable, qui renouvelle la musique orientale.

Son parcours est semé de gens incroyables qui ont illuminé son chemin : sa mère, ses sœurs, le père Balian, Maurice Martenot, Jean Picart le Doux, sa découverte des auteurs soufis et de la mythologie mésopotamienne, sa rencontre avec Pierre Petit, Adonis, Nadia Boulanger, Ziryâb, Omar Khayyam, Goethe, Gilgamesh, Sargon…

Abed Azrié nous ouvre les pages de son histoire, ses grands-parents et leur fuite à Alep en 1915 lors du génocide des Arméniens, mêlée à ce qui l’inspire : les musiques, les mythes et légendes mésopotamiennes, les religions monothéistes, leurs récits et leurs archétypes.

« Une vie entière pour apprendre cette phrase de Gilgamesh : Se renouveler en permanence »
Abed Azrié, concert pour la présentation d‘Éperdument au Phono Museum, à Paris
Compositeur français, Abed Azrié est né à Alep en Syrie, auteur d’une vingtaine d’albums, de plusieurs musiques de films et plusieurs livres dont une traduction de l’épopée de Gilgamesh (en français). Au fil des tournées en Europe, aux États-Unis ou au Mexique, sa musique rassemble un large public, conquis par la modernité de la composition et par l’universalité du message. Elle a, depuis longtemps, attiré l’attention d’artistes aussi différents que Yehudi Menuhin, John Adams, Jeff Buckley, Leonard Cohen ou René Char. Abed Azrié se veut avant tout un homme de liberté. Il croit à l’art comme ferment humaniste et défend un art libéré des codes et des frontières, s’adressant à l’être humain dans ce qu’il a de plus universel et de plus actuel.
Les textes à partir desquels il travaille dans de multiples langues (arabe, espagnol, français, vénitien, anglais ou allemand) proviennent de poètes d’Orient et d’Occident, anciens et contemporains : Adonis, Andrea Zanzotto, Omar Khayyâm, Jean Cocteau, Gibran, Hâfez, Goethe et d’autres… Tous constituent un appel à exister dans la plénitude de l’être et célèbrent le mystère de la vie, la liberté d’esprit, l’ouverture du cœur…

À première vue, Éperdumentest le récit d’une vie, mais très vite, c’est l’histoire d’une voix : celle d’un homme qui a fui l’oppression familiale et idéologique pour épouser la liberté de l’art. Ce récit se déploie comme une fugue : un thème (la révolte intime), des variations (exil, musique, mysticisme), et des résonances profondes entre narration et pensée.

Une Méditerranée pour voix intérieure

Toute quête de voix commence par une forme de silence imposé. Celle d’Abed Azrié débute dans un Alep qui n’est pas la carte postale sépia des orientalistes, mais un creuset où le sacré des liturgies se heurte à la violence du quotidien. L’air y est chargé des appels du muezzin et des carillons des églises, mais aussi des cris étouffés d’une famille sous l’emprise d’une figure paternelle écrasante. Cet homme, que l’auteur décrit comme le « type masculin ottoman », incarne une autorité qui nie l’individu, un patriarcat qui exige le silence et la soumission. Dans cette partition dissonante, la contre-mélodie vient des femmes : une grand-mère héroïque qui cache des réfugiés arméniens, des sœurs complices et, surtout, une mère, Hélène, figure tutélaire qui, face à la brutalité alcoolisée, organise la révolte. Elle ne transmet pas un héritage de rancœur, mais, comme l’écrit l’auteur avec une sobriété poignante, elle « a planté en nous le verbe “aimer” ». C’est dans cette fracture originelle que la musique cesse d’être un divertissement pour devenir une nécessité vitale. Elle est d’abord un refuge, un « bouclier » construit pour protéger son oreille, son imagination. Très vite, elle devient le langage même de l’aspiration à un ailleurs, le chant de sirène d’une Méditerranée qui promet un autre rivage, une autre rive : celle d’un Paris rêvé, non comme destination géographique, mais comme espace de libération acoustique où sa propre voix pourra enfin exister sans être niée.

L’enfant qui écoutait le monde

Abed Azrié ne déroule pas une chronologie ; il tisse une mémoire sonore. Le motif principal, celui de l’écoute, traverse tout le récit et lui donne sa cohésion profonde. Éperdument est une phénoménologie de l’oreille. De l’oralité syrienne, où les mélismes de l’église syriaque sculptent son enfance, aux ondes radio diffusant les musiques « venant de la mer », en passant par l’apprentissage obsessionnel du français à travers la traduction de poèmes de Mallarmé ou Desnos, tout passe par le prisme de l’écoute. Abed Azrié n’apprend pas le monde, il l’absorbe, il le laisse résonner en lui. Cette approche fait éclater les genres. L’autobiographie dialogue constamment avec le conte mystique – la rencontre avec le père Balian, ce saint anachorète qui ne se lave pas, tient de l’hagiographie médiévale. Le récit se fait analyse géopolitique lorsqu’il évoque la dépossession de Kilis ou du Hatay. L’écriture elle-même semble structurée musicalement. Le récit progresse par thèmes et variations. Les figures tutélaires (la mère, les Guipon, Monsieur Martenot) sont des leitmotivs réconfortants, des accords parfaits dans une composition parfois tendue. La violence du père, le dogmatisme ambiant, les désillusions de Prague sont des dissonances nécessaires qui créent la dynamique du récit. Chaque chapitre est une séquence, avec son propre tempo, ses propres couleurs. On sort d’une anecdote intime pour entrer dans une méditation sur Ibn Arabi, avant de plonger dans le souvenir concret et sensoriel d’un sorbet aux saveurs oubliées. Abed Azrié compose avec sa vie comme il composerait une suite, mêlant l’adagio des souvenirs mélancoliques au presto des découvertes parisiennes, le tout porté par une conviction profonde que rien ne doit rester lettre morte : ni l’épopée de Gilgamesh, ni un quatrain de Khayyâm, ni sa propre histoire.

Éperdument : une musique contre le bruit du monde

En échappant au particularisme du récit de migrant et à l’hermétisme du traité de musicologie, Éperdument atteint une forme d’universalité. C’est le parcours d’une âme qui cherche sa juste fréquence dans un monde saturé de bruits parasites et d’idéologies assourdissantes. Le livre s’offre comme une conversation intime et cosmopolite où dialoguent Fauré et les poètes soufis, la Sorbonne et les souks d’Alep, Rutebeuf et Georges Brassens. Abed Azrié illustre cette pensée de la préface de Hubert Haddad : « L’identité n’est pas un héritage, c’est une construction ». La sienne se forge par strates successives, par syncrétismes audacieux, où chaque rencontre, chaque lecture, chaque son est un matériau qui vient enrichir la partition initiale. Cette démarche est portée par une force que les systèmes rationnels ignorent : l’intuition. L’auteur le confesse, sa seule règle a toujours été l’instinct. C’est son intuition qui le guide vers les bonnes rencontres, les bons textes, les bonnes musiques. C’est elle qui lui fait percevoir le divin dans le regard de sa mère et le diabolique dans les dogmes sclérosés. En cela, Éperdument est une célébration de ce que l’auteur nomme sa « petite folie », cette intelligence sensible qui est le propre de l’artiste et de l’amoureux. C’est un plaidoyer pour un savoir qui ne se thésaurise pas mais qui transforme, qui fait de la vie une œuvre et de l’œuvre une manière d’être au monde. Ainsi, on referme ce livre non pas avec le sentiment d’avoir lu une biographie, mais d’avoir écouté une partition vibrante, qui continue de résonner longtemps après que le silence s’est fait. Une invitation, en somme, à écouter la fugue discrète qui se joue en chacun de nous.

Chroniqueur : Maxime Chevalier, Mare nostrum 3/07/2025

ItArtBag

Éperdument Azrié : quand le verbe devient mélodie

« L’âme des sons précède la naissance » (Hubert Haddad). C’est sous cette impulsion que le compositeur et chanteurAbed Azriénous convie à une soirée unique mêlant musique, récit de vie et poésie, pour célébrer la sortie de son ouvrageÉperdument : Un enfant d’Alep au bord de la Seineaux éditionsAl Manar, maison dédiée aux arts et littératures des pays de la Méditerranée. Le15 mai 2025, lePhonomuseumdePariss’est transformé pour accueillir une soirée de lancement pas comme les autres. Dans le cadre intime du musée, l’artiste s’est fait à la fois chef d’orchestre, chanteur et conteur. À travers une sélection musicale éclectique, allant deBachetDebussyaux influences orientales de ses propres compositions,Abed Azriéa donné vie aux pages de son livre.

Azriéaffirme : «Si on me demande ce que je préfère dans la musique, ma réponse est sans hésitation : les musiciens. Sans eux, toute ma musique demeure voilée. » Entouré de musiciens fidèles et compagnons de longue date, au violon, à l’accordéon ou à la cithare, il tisse, au fil de la soirée, une partition vivante faite d’improvisations, de lectures de poèmes, d’anecdotes intimes et d’hommages musicaux. Chaque morceau, choisi ou inventé, devient de près ou de loin une résonance d’un chapitre de son livre, une traduction sonore d’un épisode de sa vie. La scène devient ainsi le prolongement naturel de son livre: un lieu où le verbe s’incarne dans la mélodie, où l’écriture se fait musique. Ce métissage instrumental, signature d’Azrié, couplé à sa voix, fait le lien entre les âges, les cultures, les influences, pour faire dialoguer l’Orient et l’Occident, le passé et le présent, l’intime et l’universel.

Paru enavril 2025,Éperdument : Un enfant dAlep au bord de la Seineest un récit profondément habité, dans lequelAbed Azriéretrace les contours de son parcours artistique et humain.
Il y revient sur son enfance en Syrie, élevé par une mère orpheline et lumineuse, dans un contexte de privations et de traditions rigides.
Avec beaucoup de transparence,Abed Azriédéclare : «Au Moyen-Orient, vous nexistez pas individuellement », avant d’affirmer : «Je fuyais laridité de ma vie quotidienne, les conventions, le poids des traditions musicales.»

Il y raconte également sa passion précoce pour les sons de toute origine, qu’ils soient religieux, profanes ou populaires, et son rejet des carcans qui limitent la création. Très tôt, les disques venus d’Europe et la radio lui révèlent un ailleurs possible : une « autre Méditerranée », synonyme de liberté. C’est une évidence pour celui chez qui la musique est inscrite « de façon quasi biologique » : en1965, à l’âge de 19 ans,Abed Azriéquitte la Syrie pour la France, en quête d’une liberté artistique que son pays natal ne pouvait lui offrir.

Éperdument est à la fois récit d’exil, carnet d’artiste, essai musical et spirituel, où s’entrelacent réflexions sur la foi, les mythes, la création et l’amour. L’auteur y explore les racines communes des religions et se livre à une réinterprétation contemporaine des textes anciens, qu’il met souvent en musique, comme avecl’Épopée de Gilgameshoul’Évangile selon saint Jean.Éperdument : Un enfant dAlep au bord de la Seineexplore l’intersection entre musique, religion, poésie et mémoire.Abed Azriéy réfléchit à la place du sacré dans nos vies, questionne les traditions, confronte les mythes bibliques aux textes sumériens, et redonne sens aux écritures par la musique. À travers cette soirée,Abed Azriétransforme la lecture en expérience sonore, célébrant la rencontre du verbe et de la mélodie. Chaque intervention musicale, chaque mot prononcé, chaque note jouée forme une introduction vivante au livre. Une mise en bouche poétique et touchante, comme une version sonore et incarnée du texte.

Abed Azriéincarne la figure rare d’un musicien érudit, nomade, inclassable etÉperdumentdevient naturellement le prolongement de cette démarche : un livre à plusieurs voix, à lire comme on écoute une œuvre musicale.

Jacques Gehringer Delcroix

Éperdument : Un enfant d’Alep au bord de la SeinedeAbed Azrié,

éditionsAl Manar,parution en mai 2025,170 pages, 22€

Éperdument. Un enfant d’Alep au bord de la Seine, Abed Azrié (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres le 08.09.25 dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Récits

Éperdument. Un enfant d’Alep au bord de la Seine, Abed Azrié, préf. Hubert Haddad, couv. Ziad Dalloul, éd. Al Manar, 2025, 170 p., 22 €

Éperdument. Un enfant d’Alep au bord de la Seine, Abed Azrié (par Didier Ayres)

 

Tout d’abord je voudrais écrire quelques mots sur l’indication Récit inscrit sur la couverture du livre, car si l’on s’en tient au Larousse 2007, le roman a trois définitions qui pourraient donner sens à ce « récit » d’Abed Azrié. Je cite partiellement : « 1. Le roman est une œuvre littéraire, étude de mœurs, analyse de sentiments, observations réelles ou non de faits subjectifs ou objectifs ; 2. Histoire riche d’épisodes imprévus ; 3. Roman familial : fantasme dans lequel le sujet imagine ses parents et les siens ». Je trouve que le récit que fait Abed Azrié de sa propre vie correspond peu ou prou à ces définitions du dictionnaire.

Quoi qu’il en soit, nous sommes pris dans la grande et la petite histoire d’un chrétien d’Orient, vivant en lui-même une espèce de mélange de culture (peut-être difficile mélange). L’on pourrait intituler le livre : La prière et l’exil. Car en somme nous partageons la propre traversée de son histoire personnelle abouchée à un récit à la fois factuel et intellectuel.

Ma vie, aujourd’hui, résulte de toutes les expériences qui ont fait de moi ce que je suis. C’est le fruit de tout ce que j’ai vécu aussi : ouvertures et blocages, efforts, échecs et réussites. Ce qui me semblait mystérieux, invisible, insaisissable s’ouvre et se livre souvent à moi, se dévoile, s’éclaircit. Je trouve des réponses à propos de l’amour, de la fraternité, du lien familial, du rapport avec le monde. Il y a aujourd’hui beaucoup de choses dont je me passe. Ma petite folie est toujours là, et plus précieuse que jamais, elle a trouvé sa place.

Le livre se structure comme un patchwork de l’identité, d’une personnalité faite d’éléments incontestablement épars, parfois contradictoires, en tout cas invitant à voyager sur les deux rives de la Méditerranée, rives orientale et occidentale. L’auteur a vécu son enfance en Syrie (et l’on voit parfois par transparence le destin politique violent qu’a subi le pays), puis s’est dirigé, peut-être sans le savoir, vers une condition d’exilé.

Au Moyen-Orient, vous n’existez pas individuellement. Vous êtes ce que la société veut que vous soyez. Vous êtes condamné à vivre sous le contrôle des autres et dans le renoncement à ce que vous êtes en réalité.

Le principal intérêt du livre c’est d’avoir saisi la particularité d’un parcours de musicien syrien vivant en Europe. Donc, l’on voit les origines textuelles et religieuses de ce que l’on nomme une musique de fusion. L’auteur invite à penser le but de tout art, de la conception d’un spectacle musical jusqu’à sa réception par des auditeurs de différentes cultures.

De fait, c’est la quête de l’âme qui compte le plus. Âme de texture mêlée. Âme musicale du musicien. Âme d’un croyant doux et compréhensif. Abed appréhende la poésie, la pensée intellectuelle, les émotions, les phases de construction d’un spectacle, une double appréciation des musiques orientales et savantes occidentales. Tout à fait par hasard, en finissant le livre, j’ai entendu sur France-Musique la retransmission d’un opéra contemporain, mêlant les cultures, américaine, française et indienne. Il s’agissait pour moi d’une découverte, car, je crois, c’était la première mondiale de l’opéra : The Nine Jewelled Deer, de Sivan Eldar, mariage réussi de composantes de cultures étrangères les unes aux autres, mais qui au lieu de nous perdre, nous donnait un supplément de rêve et d’émotion. N’est-ce pas cela que souhaite réaliser Abed Azrié ?

Didier Ayres, La Cause littéraire


Caractéristiques

exemplaire

L'un des 2000 exemplaires de l'édition originale

format / papier

16 x 22

isbn

9782364264168

nombre de pages

170

parution

Auteur

AZRIÉ Abed

Collection

Méditerranées