Description
Je suis une femme et toute chose accolée à mon nom porte un petit « e ».
J’aime bien ce petit « e » qui ferme le nom des filles, des femmes et des femelles.
Cette boucle fermée sur elle-même qui veille là comme un coquillage et protège la chair vivante.
Une sorte de petit loquet qui s’entrouvre pour nous trouver intactes entièrement nous derrière les mots qui nous disent.
Sauras-tu soulever légèrement le petit « e » de mon genre pour me voir nue derrière la porte ?
LA CRITIQUE
« Cantilène » vue par Luce Guilbaud
Avec ce dernier livre « Cantilène », on retrouve « la douceur définitive » de Marie Huot « l’enchanteuse ».
Elle voudrait, « tandis que le monde vacille » s’appeler « Renouée » « parce que c’est un nom pour rester vivante ». Renouée, cette plante aux multiples noms, le nom de toutes les femmes réelles ou imaginaires, des amoureuses et des guerrières à la bannière flottante, des femmes qui peuvent mourir d’amour. « Renouée », « doucement et en secret » ce mot se partage et poursuit ses racines…
Retrouver l’écriture de Marie huot de livre en livre c’est faire un voyage sur le réel moelleux des nuages dans des pays de lumière et de givre, des pays de retour et de surprises, de souvenirs et de transmission aussi. Une écriture apparemment simple mêlée de légendes, de comptines et de chants retenus. Une écriture pour se dire et s’interroger, être vivante et suppliante. Une écriture de l’impossible et du doute autant que de lucidité de « fée des soupirs et des tout petits riens ». Marie est cette femme qui avance avec la pensée « des lichens au cœur de son jour ».
Elle raconte une histoire, même si elle dit le contraire, une histoire de femme amoureuse, une histoire de naissance et d’oubli. C’est une question enfouie sur la vie, l’amour, le deuil, la perte… l’espoir. Elle écrit, nous emporte sans en avoir l’air dans les marées irrésistibles du désir. Malgré son « cœur épris d’amour pris dans le gel la froidure ». Mais « ce n’est pas une histoire pour être racontée ».
C’est une écriture intime nourrie de ses lectures, généreuse et toujours surprenante. Quand « l’heure est au chien et loup » elle peut aussi « sauter d’un coq à un âne » … Une poésie qu’on lit comme une révélation pleine de couleurs changeantes, avec « toujours la vie en vue ».
Marie Huot femme et poète : dit-on « une poète ? car le mot poète porte ce petit « e » du genre féminin dont elle parle. Est-ce pour s’en excuser ? Pour moi je dirai que Marie Huot est simplement « poète » !
Il faut lire cette Cantilène étrange et familière, séduisante et fascinante.
Le livre est accompagné des dessins de Diane de Bournazel.
Luce Guilbaud. Février 2025.